L’hydre à deux têtes, mécanique et inflammatoire
PUBLIÉ LE 25/01/2022 dans LE QUOTIDIEN DU MEDECIN
La deuxième enquête « Stop Arthrose II », réalisée pendant les différentes phases de la pandémie Covid-19, reprend les mêmes objectifs que la première édition de 2013 : évaluer les principales répercussions de l’arthrose sur la qualité de vie des personnes atteintes et recueillir leurs besoins et attentes en termes de prise en charge.
L’enquête donne la même photographie que celle de 2013. On ne constate que peu ou pas d’amélioration sur l’ensemble des items. La douleur concerne 9 patients sur 10 (idem en 2013), la vie de famille est impactée pour 62 % des patients (vs 60 % en 2013), plus d’un tiers des répondants (36 %) a commencé à souffrir de douleurs arthrosiques avant l’âge de 40 ans (vs 36 % en 2013). L’arthrose gêne également le sommeil de 68 % des patients (vs 64 % en 2013) et la douleur d’arthrose est accentuée en cas de changement de temps pour 68 % des répondants (idem en 2013). En plus de la douleur, qui concerne près de 9 patients sur 10, le Dr Laurent Grange insiste « sur la fatigue, préoccupante pour un arthrosique sur deux, et sur la survenue de la douleur arthrosique dès l’âge de 40 ans, pour 1/3 des répondants, preuve que l’arthrose n’atteint pas que les personnes âgées ». L’enquête montre que la pandémie a modifié le statut algofonctionnel, l’état général de santé et le moral des patients, uniquement pendant la période de confinement strict. On observe en effet une augmentation de l’intensité de la douleur, une aggravation des facteurs de risque et plus d’inquiétude. Cette dégradation transitoire peut s’expliquer par un changement important de style de vie durant cette période, la diminution des activités physiques, une prise de poids, la baisse des relations sociales, l’isolement, le stress professionnel et familial. L’enquête confirme aussi les répercussions de la baisse de prescription et d’utilisation des AINS, sur un principe de précaution durant la première vague de confinement.
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La douleur accompagne le patient tout au long de l’évolution de la maladie. Françoise Alliot-Launois, Présidente de l’AFLAR, la qualifie d’hydre à deux têtes, mécanique et inflammatoire. « Il est important d’identifier et de traiter les facteurs qui fragilisent le patient et augmentent sa sensibilité à la douleur, précise-t-elle. Pour progresser dans le parcours de la douleur arthrosique il faut améliorer le traitement médicamenteux. L’arsenal antalgique s’est raréfié, les AINS ne sont pas assez et pas bien utilisés. Il est également essentiel de maintenir les mouvements et de bouger ; souvent les patients sont adressés trop tardivement au kinésithérapeute, alors qu’une rééducation précoce et progressive est souhaitable. Le plus important dans la gestion de la douleur est de se prendre en charge, il faut accompagner le patient dès le diagnostic, lui donner confiance pour qu’il devienne acteur de sa santé. » Le fait que l’arthrose agisse sur le moral de 81 % des patients nécessite d’y porter attention. Il faut penser à une prise en charge pluridisciplinaire et le recours à la psychologie est un axe important pour lever les préjugés et les peurs et mettre en place des stratégies d’adaptation efficaces et des plans d’action concrets. « Le psychologue peut proposer au patient des outils pour renforcer sa motivation, faciliter le passage à l’activité afin de diminuer à terme sa douleur et l’aider à retrouver le sommeil grâce des techniques de gestion du stress ou de distraction cognitive, rassure Céline Mathy, psychologue. Il va également lui proposer de travailler sa respiration, d’adopter une technique de relaxation, lui enseigner la contraction/décontraction musculaire. » Christine Nicolet |
D'après une visioconférence. L’enquête a été réalisée en collaboration entre l’AFLAR (Association française de lutte antiRhumatismale) et la Fondation arthrose, sur 2 822 personnes en France et 643 en Belgique avec un diagnostic rapporté d’arthrose. 41 % des répondants étaient en activité professionnelle. Les résultats ont été analysés sur 3 périodes : pré-Covid-19, du 12 septembre 2019 au 16 mars 2020 ; confinement strict, du 17 mars au 13 juin 2020 ; Covid-19, du 17 mars 2020 au 1er janvier 2021.
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